Envoi

Ce petit livre est né du besoin impérieux de rompre le silence dont était entouré pour des raisons multiples, psychologiquement explicables mais moralement peu valables, le malaise croissant que laisse en tant d'esprits le spectacle extraordinaire de la philosophie contemporaine. Que tant de philosophes se donnent le droit de parier de tout sans méthodes de vérification, cela ne date pas d'hier (1) et ne regarde qu'eux. Qu'ils présentent le produit de leur réflexion comme une connaissance et même comme une forme supérieure de savoir, cela est plus grave et il est surprenant que les spécialistes de toutes les disciplines en développement ne réagissent pas davantage contre un tel programme, dont les réalisations n'ont jamais connu de progrès véritable. Mais qu'ils en viennent de plus en plus à s'en prendre à la science elle-même, avec une sévérité directement (et non pas inversement) proportionnelle au carré des distances qui les séparent d'elle, il en résulte une obligation pour chacun de réagir. (Sagesse et illusions de le philosophie, Paris, Presses Universitaires de France, 2 éd. 1972, p. 87.)

(1) A propos des relations entre la pensée et le cerveau, Galien déjà disait il y a quelque vingt et un siècles «On pardonnera à des philosophes retirés dans leur coin de se tromper à cet égard, mais…, etc.» Cité par Y. Galifret, Raison présente, I, p. 76.