La construction du réel chez l'enfant – Observation 172

[p.301] A 1;0 (20), Jacqueline lance par-dessus le bord de son berceau une poupée habituellement accrochée à un cordon au-dessus d’elle ct qu’elle s’amuse souvent à saisir ou à balancer dans cette position. Elle examine un court instant l’endroit où elle est tombée (étude de la trajectoire). Dans la suite, après qu’elle a joué à autre chose, je tire le cordon à l’endroit où la poupée était suspendue d’habitude : Jacqueline se dirige alors d’emblée du côté où elle l’a lancée, pour la regarder par-dessus le bord du berceau. Elle a donc gardé un souvenir exact du déplacement.

A 1;3 (12), elle joue avec un étui à lunettes au moment où je mets un livre de l’autre côté des barreaux du parc dans lequel elle est assise. Voulant atteindre le livre, elle met derrière elle l’étui qui la gêne. Pendant au moins cinq minutes, elle essaie, mais sans succès, de passer le livre à travers les barreaux. Le livre glisse chaque fois de ses mains. Alors, lassée, elle recherche sans hésiter l’étui qu’elle ne voit plus : à demi retournée elle tend la main derrière son dos jusqu’à ce qu’elle l’ait touché.

Mais, lorsque les actions sont trop éloignées les unes des autres dans le temps et nécessitent ainsi une mémoire représentative exacte pour être ordonnées, l’enfant retombe dans ses difficultés antérieures. C’est ainsi qu’à 1;6 (27) encore, Jacqueline cache une clef sous une balustrade en A. Puis, elle joue dix minutes dans un pré et rejoint la balustrade en B (à 8 mètres de A et de l’autre côté d’un escalier). Elle dit «clef, clef» et court la chercher directement en A. Elle emporte ensuite la clef et la pose sur une couverture. [p.214] Un quart d’heure après, Jacqueline rejoignant à nouveau la balustrade dit encore «clef, clef» et retourne la chercher en A, longuement et minutieusement. Il y a donc là un résidu des conduites du quatrième stade, dû au fait de la complication du problème et des actions intermédiaires.