Fondation Jean Piaget

Présentation approfondie

Alfred Fouillée (1838-1912). Philosophe français

Auteur d’un grand nombre d’ouvrages, membre de l’Académie des sciences morales et politiques, Fouillée a adopté une métaphysique idéaliste originale, en prenant le contre-pied du matérialisme soutenu par bon nombre de savants de la fin du dix-neuvième siècle, et en réinterprétant les phénomènes étudiés par les différentes sciences de la nature, les sciences humaines incluses. Puisant une partie de son inspiration dans la monadologie et le dynamisme leibniziens, Fouillée soutient la thèse selon laquelle les idées sont des forces en ce sens qu’elles agissent, à différents niveaux et de façon de plus en plus conscientes, sur l'évolution de la réalité (la société incluse).

Si l’application de la thèse des "idées-forces" à la réalité physique paraît être dictée par un pur souci métaphysique, son application aux phénomènes biologiques (neuronaux), psychologiques et sociologiques est loin d’être stérile, puisqu’elle a conduit son auteur, d’une part, sur le plan biologique, à anticiper d’une certaine façon la thèse aujourd’hui reconnue d’une logique des neurones, et, d’autre part, sur le plan psychologique et sociologique, à prêter une grande attention aux nombreux phénomènes dans lesquels le comportement des individus et des sociétés dépend d’activités intellectuelles pouvant être étudiées au moyen de méthodes scientifiques.

Par la vigueur avec laquelle, tout en acceptant le rôle primordial de l’expérience dans l’établissement des connaissances scientifiques, Fouillée s’est opposé à toute réduction de la vie psychologique à la matière physique, ainsi que par sa métaphysique, il a facilité l’élaboration par le jeune Piaget d’une première conception, certes largement spéculative, des phénomènes psychologiques, mais qui contient déjà l’affirmation d’un lien étroit entre la notion d’équilibre et celle de norme logique. Par son impact sur Piaget, l’oeuvre de Fouillée conforte ainsi l’idée de la philosophie comme matrice des sciences, c’est-à-dire comme génératrice de thèses susceptibles d’être adoptées puis transformées par des recherches mettant en œuvre une méthodologie proprement scientifique (la méthode psychogénétique en l’occurrence).

Parmi les ouvrages principaux de Fouillée, on retiendra "La philosophie de Platon" (1869), "Le devenir de la métaphysique fondée sur l’expérience" (1889), "L’évolutionnisme des idées-forces" (1889) et "La psychologie des idées-forces" (1893).