pensée formelle
"Le caractère principal de la pensée formelle tient sans doute au rôle qu'elle fait jouer au possible par rapport aux constatations réelles" (De la logique de l’enfant à la logique de l’adolescent, p. 215).

La pensée formelle se distingue de la pensée concrète, d’une part par la nature de l’objet sur lequel elle porte (les possibles), ainsi que par l’attitude adoptée par le sujet relativement au statut de cet objet, et d’autre part par la nature des opérations utilisées pour la traiter.

La pensée formelle se caractérise d’abord, généralement, par une sorte de mise entre parenthèses, ou d’abstraction, de la réalité sensible ou imaginée qui intervient forcément dans toute pensée (ne serait-ce que sous la forme de ces signifiants arbitraires que sont les mots, ou les signes logiques et mathématiques). En pareil cas, bien que la pensée formelle puisse inclure des considérations sur une réalité sensible, perçue ou imaginée, ce par quoi elle est intéressée n’est pas cette réalité, mais le statut formel (logique ou mathématique) de ces considérations.

Mais cette pensée se caractérise surtout par la nature des opérations engagées et la nature des objets sur lesquelles elles portent. Les opérations mises en oeuvre par la pensée formelle ont pour particularité de porter, non pas principalement sur une réalité sensible, mais sur les opérations par lesquelles la pensée concrète organise cette dernière, et qui peuvent se refléter dans les propositions par lesquelles le sujet décrit son objet. C’est par exemple le cas lorsque le sujet s’intéresse avant tout aux considérations faites par rapport à une certaine réalité. Ces considérations sont construites au moyen d’opérations concrètes (classer, etc.). En examinant ces considérations, le sujet se livre ainsi à des opérations sur une réalité elle-même composée d’opérations.

Dans le cas de la logique propositionnelle, par exemple, il peut nier une affirmation, en déduire les conséquences possibles, etc. Ou encore, dans le cas de la pensée combinatoire, on voit le sujet organiser des opérations de sériations et de classifications, en les classant et en les sériant. En ce deuxième exemple, bien qu’une transformation de la réalité sensible résulte du travail de la pensée combinatoire, celle-ci a pour objet principal moins cette réalité que les opérations concrètes par lesquelles elle est ordonnée.


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