rationalisme
Dès leur apparition, il y a deux mille cinq cent ans environ, la science et la philosophie occidentales ont été ensemble traversées par deux tendances opposées privilégiant soit la déduction soit l’expérience comme source des connaissances. Si dans l’antiquité grecque cette opposition n’était pas encore très marquée, elle s’est renforcée avec la redécouverte de la philosophie et la logique d’Aristote par les philosophes chrétiens du Moyen-Age.

Le rationalisme dans sa forme originale est issu de la rencontre entre la foi chrétienne et la philosophie aristotélicienne. Il consiste à concevoir la réalité comme étant un produit de la raison, s’il est vrai qu’elle a été créée par Dieu. Les philosophes rationalistes s’efforceront dès lors de découvrir les principes premiers permettant d’expliquer par pure déduction la réalité créée, ce qui les entraînera à multiplier les spéculations les plus hasardeuses sur la nature des choses.

L’empirisme moderne aura dès lors beau jeu de s’appuyer sur le développement des sciences de la nature (et spécialement de la physique) au dix-septième et au dix-huitième siècles, pour opposer à la conception rationaliste classique une tout autre image de la science et de la réalité.

De cette critique destructrice naîtra une seconde forme de rationalisme, issue des réflexions de Kant sur les conditions de possibilité de la science. Ces réflexions aboutissent en effet à deux conclusions en ce qui concerne la raison. Selon la première, la raison théorique n’a pas le pouvoir de sortir des limites de l’expérience humaine pour fournir une connaissance de la réalité absolue. Mais il n’en résulte pas que la connaissance humaine n’a rien de rationnel, comme le soutient l’empirisme. Au contraire, et c’est la seconde conclusion d’importance au sujet de la raison, celle-ci intervient nécessairement dans la constitution des connaissances, aussi bien d’ailleurs dans l’organisation des données de l’expérience que dans l’explication des phénomènes.

Ces deux conclusions sont le point de départ du rationalisme critique, qui parvient à éviter tant le dogmatisme du rationalisme classique que le scepticisme, sur lequel débouche l’empirisme, quant à la possibilité d’une connaissance objective de la nature.


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