Fondation Jean Piaget

La pensée mathématique

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L'un des aspects les plus remarquables de la pensée mathématique est sans doute le caractère anticipateur des cadres logico-mathématiques par rapport au contenu expérimental qui vient les remplir après coup. Comment expliquer en effet que les mathématiques, malgré leur nature essentiellement déductive, s'accordent de façon permanente avec la réalité physique et parviennent à assimiler le réel tout en le dépassant ? Un second aspect, non moins important, concerne la rigueur du raisonnement mathématique jointe à sa fécondité illimitée. En d'autres termes, comment expliquer que les mathématiques parviennent à engendrer des êtres nouveaux ou des structures nouvelles sans perdre leur rigueur ? Piaget considère qu'un tel problème soulève en réalité deux questions : l'une, logique, est celle de la réductibilité ou de la non réductibilité des structures nouvelles aux structures anciennes; l'autre, psychologique, consiste à déterminer si les structures nouvelles sont le résultat d'une découverte ou d'une invention, en montrant comment intervient le sujet dans l'élaboration des connaissances logico-mathématiques. Tels sont, pour Piaget, les principaux problèmes épistémologiques que soulève la pensée mathématique.

S'opposant à toute interprétation empiriste, aprioriste, conventionnaliste ou nominaliste des mathématiques, Piaget en propose une interprétation fondée sur les lois de la coordination générale des actions. Il considère que les mathématiques, au même titre que la logique, ne sont pas réductibles à un langage (interprétations nominaliste et conventionnaliste) mais constituent essentiellement un instrument de coordination et de structuration. Cette activité structurante, qui intervient à tous les niveaux d'élaboration des connaissances physiques, consiste à ajouter des éléments nouveaux à la réalité. Les mathématiques ne se réduisent donc pas à une simple traduction symbolique des données expérimentales. Par ailleurs, si le langage constitue effectivement une condition nécessaire à l'achèvement des structures logico-mathématiques, il ne suffit nullement à expliquer l'ensemble des constructions opératoires effectuées par la pensée au cours de son développement.

Piaget conteste également l'interprétation empiriste selon laquelle les structures logico-mathématiques seraient tirées de l'expérience sur les objets. Il insiste sur la nécessité de distinguer deux types d'expériences: l'une physique, qui conduit à abstraire de l'objet ses propriétés, et l'autre logico-mathématique, qui porte sur les résultats des actions et sur leur coordination. En ce cas, les objets ne servent que de support car les propriétés découvertes sur les objets ont été introduites par le sujet. C'est pourquoi l'expérience est peu à peu remplacée par la déduction opératoire, la phase de compréhension déductive immédiate, succédant à une phase où la constatation expérimentale constitue un support nécessaire.

Enfin, il réfute l'interprétation aprioriste des mathématiques, qui implique dans l'accord de la déduction avec l'expérience, l'expression d'une harmonie assurée dès le départ par le caractère anticipateur des structures a priori du sujet appliquées à l’expérience, et il situe le problème de la nature des «êtres» et des structures mathématiques dans une perspective essentiellement génétique et constructiviste. La question qu'il aborde est la suivante : d'où procèdent les mathématiques et en quoi consiste leur développement ?

En leur source, les opérations logico-mathématiques procèdent, selon Piaget, des actions les plus générales que le sujet exerce sur les objets ou collections d'objets. Ces actions comportent deux pôles, initialement indifférenciés du point de vue du sujet lui-même, qui renvoient aux aspects physique et logico-mathématique. L’aspect physique, plus ou moins spécialisé en fonction des objets, correspond à l'accommodation des schèmes d'actions ou d'opérations aux caractéristiques de l'objet et il est source de connaissances physiques relatives aux propriétés de l'objet. L’aspect logico-mathématique est lié aux coordinations générales de l'action, c'est-à-dire aux multiples relations structurales que les divers schèmes d'actions ou d'opérations entretiennent entre eux. C'est ainsi, par exemple, qu'au plan de l'activité sensori-motrice, tout ce qui peut être saisi peut être regardé, mais non l'inverse, etc. Il existe donc des relations d'assimilation et d'accommodation réciproques entre les schèmes eux-mêmes, correspondant aux coordinations des actions entre elles. Or, c'est cette activité structurante qui constitue, selon Piaget, la source des opérations logiques et mathématiques ou connaissances logico-mathématiques.

Au cours du développement ontogénétique, on assiste à une différenciation graduelle des opérations physiques et des opérations logico-mathématiques et à une libération progressive des formes par rapport à leurs contenus. Au niveau de l'activité sensori-motrice, il existe déjà un schématisme de l'action, distinct des objets sur lesquels elle porte et qui préfigure les opérations. Ce schématisme constitue en quelque sorte la forme à travers laquelle sont appréhendés les contenus physiques. Mais cette forme n'est pas dissociée de son contenu. Au niveau opératoire concret, apparaissent les premiers systèmes déductifs distincts des opérations physiques. Ils sont constitués par les groupements logiques de classes et de relations et par les structures numériques et spatiales. Mais les opérations ainsi constituées ne sont pas encore complètement indépendantes des objets concrets, réels, sur lesquels portent les manipulations du sujet. Au niveau opératoire formel, les opérations logico-mathématiques s'affranchissent de leurs contenus physiques. Elles parviennent ainsi à dépasser la réalité expérimentale en insérant les transformations réelles dans un ensemble de transformations opératoires possibles dont elles tirent leur intelligibilité. Procédant de la coordination générale des actions exercées par le sujet sur les objets, les opérations logico-mathématiques de la pensée naturelle s'éloignent donc de plus en plus, au cours de leur développement, de l'objet immédiat. Mais loin de perdre le pouvoir de rejoindre le réel, elles permettent au contraire d'accéder à une compréhension beaucoup plus complète et précise de celui-ci.

Comment expliquer cette autonomie progressive du développement de la pensée mathématique par rapport à l'expérience physique ? Piaget attribue la formation de nouvelles opérations logiques et mathématiques à un processus d'abstraction réfléchissante ou constructive dont le propre est de tirer une connaissance nouvelle des actions exercées sur les objets à partir tout d'abord de leurs résultats sur l'objet, puis de généraliser cette organisation préalable en la représentant sous la forme d'un modèle plus large d'opérations qui peuvent être conçues simultanément. Cette abstraction, qui implique une prise de conscience par le sujet de ses propres actions ou opérations, est constructive dans la mesure où elle conduit à combiner, en de nouvelles totalités opératoires (nouvelles structures logico-mathématiques), les actions ou opérations abstraites de leur contexte primitif ou des systèmes antérieurs. C'est ainsi que les actions ou opérations d'un niveau donné constituent à la fois une forme par rapport aux objets qu'elles structurent et un contenu par rapport aux opérations du niveau supérieur. En somme, il y a construction continuelle de structures nouvelles à partir des structures anciennes et de leurs interactions adaptatives avec les objets. C'est un tel processus de construction par abstraction réfléchissante, c'est-à-dire de formalisation à l'oeuvre dès les stades élémentaires, que prolonge selon Piaget, l'évolution de la pensée mathématique. Aussi, est-ce dès la formation des notions mathématiques les plus élémentaires que l'on découvre les raisons pour lesquelles les mathématiques finissent par devenir pures.

Cette continuité entre la psychogenèse des structures logico-mathématiques de la pensée naturelle et l'évolution de la pensée mathématique, qui se manifeste par l'élaboration de formes de plus en plus abstraites, amène Piaget à chercher des liens entre les structures élémentaires des actions ou opérations du sujet, résultant d'une construction progressive, et les structures axiomatisées de la mathématique (structures-mères des Bourbaki) mises à jour par l'analyse régressive. Il constate dans les activités de l'enfant trois sortes de structures élémentaires, irréductibles et dont les combinaisons engendreront de nouvelles structures. Ce sont les structures de classes, dont la forme de réversibilité est l'inversion ou annulation, les structures de relations, dont la forme de réversibilité est la réciprocité et enfin, les structures spatiales qui, sous leurs formes élémentaires, sont de caractère topologique. Or, Piaget considère qu'il existe un lien entre ces structures caractérisant la pensée naturelle et les structures fondamentales sur lesquelles repose l'architecture des mathématiques, à savoir : les structures algébriques, les structures d'ordre et les structures topologiques. Ce lien ou cette correspondance entre l'élémentaire du point de vue génétique et le fondamental du point de vue formel se présenterait sous la forme d'une filiation génétique telle que, la construction des structures nouvelles procédant par abstraction réfléchissante à partir des structures de niveau antérieur, les structures fondamentales découvertes par analyse réflexive ou régressive intégreraient, tout en les dépassant, les structures élémentaires. Ainsi, de même qu'entre la logique formalisée et la logique naturelle il n'y a pas rupture mais continuité, de même, les constructions formelles du mathématicien prolongeraient les constructions génétiques de la pensée naturelle et seraient même conditionnées par elles. Entre la régression axiomatique et l'ordre de la construction génétique, il y aurait donc une parenté réelle, la seconde ne devenant possible qu'en raison des constructions génétiques antérieures.

Quelles sont donc en définitive les réponses que Piaget apporte aux principales questions épistémologiques que soulève la pensée mathématique ? Pour ce qui est de l'accord ou de l'harmonie de la pensée logico-mathématique avec le réel, Piaget l'attribue au fait que cette pensée plonge dans la réalité physique, par l'intermédiaire des actions dont elle procède et qui constituent elles-mêmes le prolongement de l'organisation biologique. Les structures organiques seraient ainsi les conditions préalables du fonctionnement de la pensée. C'est donc en vertu d'une continuité fonctionnelle du biologique au cognitif, des structures organiques aux structures mentales, que se trouverait assuré, dès le départ et de l'intérieur, l'accord des structures les plus abstraites et les plus déductives de la pensée avec la réalité physique.

En ce qui a trait maintenant au problème de la fécondité et de la rigueur du raisonnement mathématique, il est lié au constructivisme mathématique. La fécondité des mathématiques réside dans l'irréductibilité des structures nouvelles aux structures anciennes, les constructions mathématiques consistant en une suite indéfinie de combinaisons nouvelles. C'est ainsi que l'abstraction réfléchissante permet la constitution d'une structure plus riche et plus forte à partir d'une structure plus faible et plus pauvre, la continuité étant assurée par l'intégration dans un système plus large des éléments abstraits du système antérieur et la nouveauté, par les combinaisons nouvelles entre les éléments ainsi abstraits. Dans une telle perspective, les mathématiques ne sont pas réductibles à la logique bien qu'elles lui empruntent certains éléments. Enfin, c'est cette constructivité qui permettrait d'assurer un progrès dans la rigueur. En effet, le constructivisme mathématique, tout comme le constructivisme logique, est lié, selon Piaget, au problème des limites et conditions de la formalisation. C'est dans la mesure où la rigueur d'une théorie formalisant une structure ne peut être obtenue de l'intérieur, c'est-à-dire par ses propres moyens, qu'il est nécessaire de construire un système plus fort. Le système supérieur garantissant la rigueur du système subordonné doit lui-même avoir recours à un système plus fort pour assurer sa propre rigueur. Il y aurait donc une hiérarchie dynamique et constructive des structures, liée à leur insuffisance à assurer leur propre cohérence interne ou leur non-contradiction.

Un même processus d'abstraction réfléchissante, source de reconstructions qui dépassent, en les intégrant, les constructions antérieures, rendrait compte aussi bien de la construction génétique que la reconstruction axiomatique. C'est ainsi que les divers paliers d'axiomatisation dépendraient du degré de prise de conscience des opérations, en tant que processus réflexif. Le développement de la pensée mathématique serait donc lié à la prise de conscience graduelle des opérations, consistant en une construction réelle reconstruisant sous une forme réflexive les mécanismes internes de la pensée.

©Marie-Françoise Legendre

Toute extrait de la présente présentation doit mentionner la source: Fondation Jean Piaget, Piaget et l'épistémologie par M.-F. Legendre
Les remarques, questions ou suggestons peuvent être envoyées à l'adresse: Marie-Françoise Legendre.

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Citations

Mathématiques
(…) elles ne se réduisent nullement à une description du réel, tout en s’y adaptant avec exactitude : elles le dépassent en effet, de toutes parts (les diverses formes d’infinis, d’espaces, de fonctions, etc) et consistent en une théorie de toutes les transformations possibles et pas seulement réelles. B.C., p.. 22-23
(…) on peut considérer les mathématiques comme un système de constructions s’appuyant également en leurs points de départ sur les coordination des actions et des opérations du sujet, et procédant par une succession d’abstractions réfléchissantes de niveaux toujours plus élevés. L.C.S., p. 405
Les mathématiques ne constituent, en effet, nullement un simple système de notations au service de la connaissance physique, mais un instrument de structuration parce que le propre des opérations est de produire des transformations. Que celles-ci soient exprimables en en «symboles» n’enlève rien à leur nature active et constructive (…). B.C., p. 76

Union des mathématiques et de la physique
L’union des mathématiques et de la physique n’est donc pas celle du signe et du signifié mais celle de l’activité structurante à un donné qui demeurerait sans elle chaotique, inintelligible et surtout saturé d’éléments subjectifs au sens de la subjectivité déformante et égocentrique du moi par opposition à l’activité du sujet épistémique. B.C., p. 467-468

Construction de la logique et des mathématiques
Si la logique et les mathématiques se construisent au moyen d'éléments abstraits des coordinations mêmes de l'action, il faut alors admettre que cette abstraction ou différenciation porte jusqu'au sein des coordinations héréditaires, puisque les mécanismes coordinateurs de l'action tiennent toujours, en leur source, à des coordination réflexes et instinctives. Cela ne revient évidemment pas à soutenir que la logique ou les mathématiques soient innées au préformées, puisqu'au contraire l'analyse génétique montre assez qu'elles se construisent, et même beaucoup plus graduellement qu'on ne l'imaginait jadis: mais cela signifie que les matériaux de cette construction, ou plutôt de cette suite et de cet emboîtement de constructions successives, remontent de proche en proche par abstraction ou différenciation régressives jusqu'aux coordinations les plus élémentaires et par conséquent les plus organiques. I.E.G., Vol. III. p. 289.

Accord des mathématiques avec le réel
C'est donc de l'intérieur et dans la mesure où le sujet tire son fonctionnement du réel par ses racines biologiques et physico-chimiques, et non pas au cours du déploiement de ses activité extérieures, que le sujet est en interaction avec l'objet en ce qui concerne les coordinations générales des actes, et c'est pourquoi ces coordinations s'accordent toujours avec le réel dont elles procèdent en leur source. I.E.G., Vol.I, p. 327
Bref, en leur source, les schèmes coordinateurs d'actions suffisent à engendrer les opérations logiques et mathématiques sans emprunter leur matière à l'objet. Ils sont cependant constamment accommodés au réel, mais par une accommodation active et non pas passive, c'est-à-dire qu'ils complètent la réalité physique en lui fournissant un système de rapports qui s'accordent avec elle sans être tirés d'elle. Et, s'il en est ainsi, c'est que les opérations logico-mathématiques agissent sur le réel sans transformer l'état des objets, parce qu'elles se limitent aux modifications (réelles ou virtuelles) de position ou d'assemblage, et qu'elles restent indépendantes des actions physiques en jeu, simplement coordonnées par de telles opérations et non pas rendues solidaires de cette coordination même. I.E.G., Vol. I, p. 331.

Fécondité des mathématiques et élaboration de formes
(…) le tableau que fournit la pensée naturelle est, non pas celui d'une dualité simple entre, d'une part, des contenus directement atteints intuitivement et, d'autre part, des formes fournies par le seul langage ou le seule pensée hypothético-déductive, etc., mais celui d'une hiérarchie continue telle que les structures cognitives d'un certain niveau jouent toujours simultanément le rôle de formes par rapport aux structures de niveaux inférieurs (qui sont encore des formes) et le rôle de contenu par rapport aux structures de niveaux supérieurs. C'est ainsi que les structures opératoires concrètes sont des formes par rapport aux schèmes sensori-moteurs (car les objets sur lesquels portent ces opérations concrètes sont déjà schématisées par les schèmes sensori-moteurs ou les schèmes perceptifs), mais elles constituent des contenus par rapport aux structures opératoires hypothético-déductives.

Or, la leçon fondamentale d'un tel état de choses est que l'élaboration des formes est inscrite au programme de la pensée naturelle elle-même et se trouve déjà à l'oeuvre bien avant que les mathématiques scientifiques ne multiplient indéfiniment le foisonnement de ces formes.
E.E.G., Vol. 14, E.M.P p. 264

Fécondité du raisonnement mathématique
La fécondité du raisonnement mathématique dépasse sans commune mesure celle du raisonnement logique pour cette raison bien simple qu'au lieu d'emboîter sans plus la partie dans le tout ou de ne relier les parties entre elles que par complémentarité ou intersection (celle-ci étant à nouveau une inclusion) le raisonnement mathématique construit un ensemble toujours plus riche de relations entre les parties, considérées en elles-mêmes et sans passer par l'intermédiaire du tout (produits, correspondances biunivoques, etc.). L'extension considérable que marque le passage du logique au mathématique tient donc à toute la différence qui sépare du «groupement» (ou composition réversible des relations de partie à tout), les groupes numériques, algébriques et géométriques fondés sur les relations directes des parties entre elles. I.E.G., Vol. I, p. 314

Fécondité des constructions mathématiques
Bref, la construction inépuisablement féconde des mathématiques tient à un double mouvement de généralisation opératoire qui crée les structures nouvelles au moyen d’éléments antérieurs, et d’abstraction réflexive ou de différenciation qui tire ces éléments du fonctionnement propre aux paliers inférieurs. Rudimentaires et approximatives en leur point de départ, les coordinations pratiques qui sont à la source de la pensée se prolongent ainsi en coordinations toujours mieux formalisées et de plus en plus abstraites, parce que l’abstraction qui les caractérise est une abstraction à partir des opérations et même des actions antérieures et non pas une abstraction à partir de l’objet. I.E.G., Vol. I, p. 333

Source des êtres mathématiques
(…) chercher la source génétique des êtres logico-mathématiques dans les coordinations générales de l’action ne signifie donc pas que celles-ci contiennent d’avance ceux-là, mais que les constructions qui en dérivent par le jeu des abstractions réfléchissantes sont à la fois nouvelles et non arbitraires, nouvelles parce que non contenues en elles et non arbitraires parce que rentrant dans un cadre prédéterminé de possibilités. E.E.G., Vol. 14 (E.M.P), p. 323.

Développement des êtres mathématiques
(…) la courbe du développement des êtres mathématiques suit donc une direction à la fois nette et paradoxale : procédant de la coordination des actions exercées par le sujet sur les objets, elle s’éloigne toujours plus de cet objet immédiat, mais sans cesser de conserver le pouvoir de le rejoindre, et en le retrouvant en fait à tous les niveaux de profondeur ou d’extension, auxquels son analyse physique peut conduire. I.E.G.,Vol. I, p. 324

Mathématiques pures
Les mathématiques pures sont celles dont les axiomes demeurent acceptables et dont les théorème restent valables indépendamment de tout objet empirique ou même de tout contenu intuitif. E.E.G.,Vol. 14, E.M.P., p. 242.
Au total les deux principaux caractères de mathématiques pures sont (a) leur indépendance à l'égard des objets empiriques et des intuitions de niveaux élémentaires (imagées ou opératoires concrètes et (b) l'homogénéité croissante qu'elles introduisent entre les différentes branches des mathématiques, avec rupture des cloisons traditionnelles entre la géométrie et l'analyse ou entre la topologie et l'algèbre, etc. E.E.G., Vol. 14, E.M.P., p. 245.
Dans la mesure, en effet, où les mathématiques pures sont conformes aux tendances permanentes des mathématique (du double point de vue des caractères a) et b) mentionnés à l'instant) c'est dès la formation psychologique des notions mathématiques les plus élémentaires que l'on doit pouvoir découvrir les raisons pour lesquelles les notions finissent par devenir «pures» ou par servir de point de départ aux notions devenant «pures». E.E.G., Vol. 14, E.M.P., p. 246

Expérience physique vs logico-mathématique
Il convient (…) de distinguer deux sortes d'expériences, ou, si l'on préfère s'exprimer ainsi, deux sortes de composantes en toute expérience (mais entendu que l'une ne dérive pas de l'autre); l'expérience (ou la composante) physique et l'expérience (ou la composant)e logico-mathématique. L'expérience physique consiste à agir sur les objets pour découvrir leurs propriétés en les tirant d'eux par abstraction «simple» à partir des informations perceptives auxquelles ils donnent lieu (…). L'expérience logico-mathématique (nécessaire au jeune enfant à un niveau où il n'est pas encore capable d'opérations ni de déduction réglée) consiste aussi à agir sur les objets; seulement elle tire son information, non pas de ces objets comme tels, mais, ce qui est différent, des actions qui s'exercent sur eux et les modifient, ou, ce qui revient au même, des propriétés que les actions introduisent dans l'objet. L.C.S., p.385.

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[…] le sujet ordonne son temps propre en utilisant le temps physique dans lequel il intègre ses actions comme il ordonne le temps physique en utilisant sa mémoire et son activité d’organisme participant, à titre d’élément parmi les autres, aux modifications du milieu ambiant.