1955 , avec Bärbel Inhelder.
De la logique de l'enfant à la logique de l'adolescent
… Chapitre 5: La chute des corps sur un plan incliné et les opérations de disjonction
Paris: Presses Univ. de France. (2e éd. 1970.), pp. 73-83
Texte PDF mis à disposition le 21.01.2009



L’expérience examinée dans ce chapitre complète en un sens une autre que Piaget avait exposée en 1927 dans la dernière section du chapitre 4 de son ouvrage sur «La causalité physique chez l’enfant» (JP27). Cette dernière section concernait l’explication de la chute des corps (et de l’absence de chute des corps célestes); une situation y était décrite dans laquelle était demandé aux enfants d’anticiper la vitesse de chute de deux corps placés sur un plan incliné, l’un des deux corps étant plus lourd que l’autre. Le but était alors de vérifier certaines propriétés que les enfants entre 7 et 10 ans attribuent spontanément au poids dans la chute des corps (le poids étant considéré chez bon nombre de ces enfants comme une force interne qui pousse le corps vers le bas, ou au contraire lui permet de résister à une chute).

Au début des années cinquante, Inhelder et ses collaborateurs reprennent cette expérience dans leur étude sur le développement des «attitudes expérimentales» chez les enfants et les adolescents, et plus particulièrement sur leur capacité à découvrir la méthode de dissociation des facteurs permettant de dégager celui ou ceux d’entre eux expliquant un phénomène physique, et dans le cas particulier le ou les facteurs qui expliquent les distances à laquelle parviennent des corps lancés sur un plan incliné.

Si lors des premières étapes, les réponses données par les enfants sont conformes à ce qui avait été observé par Piaget en 1927 (l’élan plus ou moins grand projetant les corps à une plus ou moins grande distance du plan incliné, et donc cette plus ou moins grande distance sont expliqués par le poids plus ou moins grand des objets utilisés dans l’expérience), les dernières étapes révèlent les compétences logiques nécessaires pour mettre spontanément en oeuvre le procédé de dissociation des facteurs prouvant que ce ne sont ni le poids des corps lâchés sur le plan incliné, ni même l’inclinaison et la longueur de ce plan qui rendent compte des faits observés, mais la hauteur à partir de laquelle ces corps sont lâchés.

Les derniers paragraphes de ce chapitre sur «La chute des corps sur un plan incliné», contiennent la modélisation logique des raisonnements plus ou moins explicites qui rendent compte de l’usage de la méthode de dissociation des facteurs chez les adolescents réussissant à découvrir ce rôle de la hauteur dans la distance de parcours d’un projectile, ainsi que des raisonnements qui sont utilisés par les adolescents pour justifier ce rôle de la hauteur. Cette modélisation logique complète l’analyse psychologique des réponses des sujets en révélant le rôle de la hauteur en tant qu’invariant d’un groupe INRC de transformations possibles composé des actions d’agrandissement de la longueur du plan incliné et des actions d’agrandissement de l’angle de ce même plan, l’agrandissement de l’une ou l’autre de ces dimensions en jeu pouvant être compensé par la diminution proportionnée de l’autre dimension, de sorte à laisser inchangée la hauteur de chute du projectile placé sur le plan incliné et d’atteindre ainsi une même distance de parcours du projectile.

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