La construction du réel chez l'enfant – Observation 123

[p.178] A 1;6 (8), Jacqueline lance une balle sous un canapé. Mais, au lieu de se baisser d'emblée et de la rechercher par terre, elle regarde l'endroit, comprend que la balle a dû traverser l'espace situé sous le canapé et se met en marche pour aller par derrière. Seulement, ayant une table à sa droite, et le canapé étant adossé à un lit sur la gauche, elle commence par tourner le dos à l'endroit où la balle a disparu, puis elle contourne la table et enfin arrive derrière le canapé, directement à la bonne place. Elle a donc bouclé le cercle par un itinéraire différent de celui de l'objectif et élaboré ainsi un « groupe » par représentation du déplacement invisible de la balle et du « détour » à accomplir pour la retrouver.

A 1;6(11), de même, Jacqueline perd sa balle sous un grand lit. Elle se penche et voit que la balle est engagée profondément. Jacqueline se relève alors et fait le tour du lit en contournant aussi une table de chevet. Le lendemain, au jardin, elle trouve un détour analogue pour me rejoindre de l'autre côté d'une corde tendue (mais dans ce dernier cas le chemin entier était visible d'avance).

Les semaines suivantes, je note de nombreux détours parmi les meubles de mon bureau. Le plus net est celui-ci, 1; 10(21). Je mets une poupée sur le dossier d'un canapé situé dans l'embrasure de la fenêtre: Jacqueline, constatant qu'elle aura trop de peine par devant, ne cherche même pas à l'atteindre, mais va se faufiler péniblement entre le canapé et la fenêtre, puis elle se lève et saisit l'objectif.