Fondation Jean Piaget

Le rôle du comportement dans les processus évolutifs

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Piaget relie le comportement à l’adaptation praxique ou cognitive dont la finalité n’est pas seulement d’assurer la survie de l’organisme ou de l’espèce mais d’étendre leurs pouvoirs d’action sur leur environnement. Ce type d’adaptation, qui nécessite une adéquation à des particularités spécifiques du milieu, ne saurait résulter sans plus de variations fortuites sélectionnées après coup. De ce point de vue, le comportement ne constitue pas seulement un produit de l’évolution résultant de variations morphologiques héréditaires, mais l’un de ses déterminants. Attribuant à celui-ci un rôle fondamental à titre de facteur nécessaire mais non suffisant de l’évolution, Piaget cherche à comprendre la nature de son action. Reliant le comportement à l’épigenèse, qui fait intervenir une interaction entre la programmation génétique et les influences du milieu, il cherche à comprendre comment cette adaptation phénotypique que constitue le comportement peut avoir un impact sur les processus généraux de l’évolution vitale. La solution qu’il propose fait appel à son modèle de la phénocopie qui se présente comme un tertium entre le lamarckisme et le néo-darwinisme. Ce modèle purement spéculatif vise à rendre compte de la formation de comportements spécifiques élémentaires suffisamment simples pour avoir été inventés par l’animal en ses apprentissages ou acquisitions phénotypiques et qui ont ensuite été reconstruits par phénocopie. Mais un phénotype stabilisé en un milieu constant et différencié ne donne pas nécessairement lieu une phénocopie si bien qu’on peut distinguer des degrés intermédiaires entre des conduites pouvant se fixer et d’autres non héritables, entre des instincts stéréotypés et d’autres s’accompagnant de variations individuelles plus ou moins importantes. Par ailleurs, si l’on peut attribuer à la phénocopie la formation d’instincts élémentaires, il n’en va pas de même des formes de comportements trop complexes pour avoir été inventées par l’animal individuel à un niveau phénotypique. Piaget fait alors l’hypothèse que de tels comportements résulteraient de combinaisons dont les formes seraient analogues à celles de certaines connexions neuroniques caractérisant les interactions géniques et les renforcements complétifs, en partant des compositions possibles entre des comportements élémentaires. Ils supposeraient eux aussi une action sélective du milieu épigénétique.

Piaget situe son modèle entre deux interprétations extrêmes du rôle du comportement dans l’évolution : celle de Lamarck, qui postule l’hérédité des caractères acquis, et la doctrine néo-darwinienne qui, sans chercher à expliquer comme tel le comportement, le considère de manière implicite comme dû à des variations aléatoires sélectionnées après coup. Si la première interprétation fait du comportement la cause de l’évolution, c’est-à-dire de la formation d’organes spécialisés, la seconde n’attribue au comportement aucun rôle actif dans la production de variations évolutives. La principale difficulté de la thèse de Lamarck réside, selon Piaget, dans son interprétation empiriste du comportement, conduisant à lui attribuer une origine essentiellement exogène et à négliger son dynamisme interne. Quant à la doctrine néo-darwinienne, elle ne tient pas suffisamment compte des différences qualitatives entre l’évolution des structures anatomiques et celle des structures comportementales, entre les variations morphologiques aboutissant à des adaptations qui ne peuvent être évaluées qu’après coup et les variations comportementales qui conduisent à une gamme plus ou moins étendue d’adéquations réalisables. Pourtant, si l’on accepte l’idée d’un dynamisme interne du comportement, dont la finalité première est l’alimentation des schèmes d’assimilation, il n’y a pas, selon Piaget, dualité mais plutôt synthèse entre les facteurs d’organisation internes et la soumission aux circonstances extérieures. Le développement de l’éthologie a d’ailleurs contribué, pour Piaget, à démontrer plus clairement le rôle du comportement dans l’évolution. Toutefois, une grande partie des éthologiste, restés fidèles au darwinisme, n’attribuent de rôle évolutif au comportement que sur le terrain de la sélection et non pas sur celui de la formation même des variations héréditaires. Or, si l’on veut comprendre le rôle du comportement dans l’évolution, il faut considérer la formation de nouveaux comportements pas seulement en lien avec leur succès dans la sélection, mais également en relation avec l’organisation et l’adaptation endogènes des êtres vivants. C’est ce dont cherche à rendre compte le modèle de la phénocopie qui prend appui sur un certain nombre d’idées empruntées à Baldwin, Huxley, Waddington, Weiss et Goldschmidt.

Piaget retient l’idée de sélection organique, empruntée au psychologue James M. Baldwin qui cherche à expliquer la fixation héréditaire de comportements sans recourir comme Lamarck à une causalité directe, mais il la réinterprète en termes de reconstructions endogènes. L’intérêt de cette notion de sélection organique, qui renvoie pour Piaget à l’idée de variation phénotypique ou accommodat, est de «mettre en évidence la collaboration active des organismes au mécanisme de la sélection plutôt que de s’en tenir à un triage imposé par le seul milieu» (C.M.E., p. 45). Toutefois, pour rendre compte du remplacement d’un phénotype par un génotype (ce que Piaget appelle la phénocopie), la sélection organique demeure insuffisante si elle n’est pas reliée à un autre processus de sélection interne (ce que Baldwin appelle «intrasélection»). En effet, pour Piaget, l’adaptation à un nouveau milieu n’a pas seulement pour effet d’engendrer de nouvelles conduites, mais peut également induire des déséquilibres pouvant altérer le milieu intérieur à des niveaux hiérarchiques plus élémentaires et c’est alors au sein de ce milieu intérieur modifié que va s’opérer la sélection des nouvelles mutations. Le milieu intérieur constitue dès lors un intermédiaire causal nécessaire entre les deux formations successives, celle du phénotype et son remplacement par un nouveau génotype.

Piaget s’inspire également de la perspective cybernétique de Waddington qui établit une distinction entre deux grands sous-systèmes, génétique et épigénétique, reliés entre eux par des circuits régulatoires conférant une causalité circulaire aux relations entre l’épigenèse et l’exploitation du milieu de même qu’entre celle-ci et les actions de la sélection naturelle. De la doctrine de Waddington, il retient deux aspects essentiels : d’abord le fait que les organismes choisissent leur milieu, tout comme celui-ci les fait varier en retour ; ensuite, le mécanisme central de l’assimilation génétique qui repose sur un système à boucle faisant en sorte que les modifications phénotypiques dues au milieu sont soumises à un processus sélectif lié aux synthèses successives qui dépendent du génome. Cette théorie rejoint, sur certains aspects, ses propres conceptualisations en psychologie et en épistémologie. Il s'en dégage en effet deux notions dominantes : celle de totalité relationnelle comportant des systèmes de régulations et une causalité cybernétique; celle d'un historicisme des formes, c'est-à-dire d'une hiérarchie diachronique ou filiation génétique des types d'organisation censés représenter l'évolution. Par ailleurs, Waddington insiste sur le rôle du comportement dans les mécanismes formateurs de l’évolution, le comportement apparaissant à la fois comme un producteur de changements évolutifs et une résultante de ceux-ci. Il fait également intervenir le mécanisme central de l’assimilation génétique qui suggère que la sélection n’opère pas directement sur les gènes mais sur les caractères des phénotypes qui demeurent néanmoins subordonnés à un «contrôle génique». Piaget souligne néanmoins le caractère équivoque de la notion de «contrôle génique» chez Waddington qui ne distingue pas suffisamment les caractères «déterminés par le génome» de ceux qui sont simplement «compatibles avec l’action des gènes» mais influencés par le milieu. Les solutions de Baldwin et de Waddington, quoique séduisantes, paraissent donc insuffisantes à Piaget et c’est pour combler ces lacunes qu’il emprunte au généticien Richard Goldschmidt l’idée de «phénocopie» dont il cherche à donner une interprétation qui permette de rendre compte du caractère héréditaire de comportements spécifiques élémentaires initialement inventés par l’animal puis génétiquement reconstruits (Voir en particulier l’ouvrage A.V.P.I).

Dans son modèle de la phénocopie, Piaget retient des travaux de Paul Weiss sur la hiérarchie des systèmes trois idées fondamentales, également présentes dans son modèle de l’équilibration qui en constitue en quelque sorte le pendant sur le plan cognitif. Elles expriment la nécessité de distinguer, en un système hiérarchisé (aussi bien cognitif que biologique), constitutif d’une totalité relationnelle, différents niveaux d’intervention de la dynamique propre à l’organisation du système : d’une part, les régulations fonctionnelles caractérisant les échanges avec l’environnement ; d’autre part, les régulations structurales qui concernent les relations parties/tout ou les relations entre parties à l’intérieur même du système. Piaget y recourt pour traduire la nature des régulations intrinsèques, inhérentes à la dynamique de l’organisation (conçue comme un fonctionnement) des systèmes cognitifs aussi bien que biologiques. Trois formes de régulations permettent d’assurer la conservation du système au travers des transformations. Il s’agit en premier lieu de l’intervention de dynamiques globales assurant la conservation du système en dépit de modifications survenant au niveau de ses composantes. Elles tiennent au caractère interdépendant des éléments constitutifs du système et ont un pouvoir d’intégration et de direction qui trouve son équivalent cognitif dans ce que Piaget qualifie d’équilibre entre la différenciation et l’intégration caractérisant les structures d’ensemble. Il y a ensuite l’obligation de reconstructions continuelles ou restructurations réversibles liées au fait que la conservation du système n’est pas statique mais dynamiques. Elles trouvent leur équivalent cognitif dans la réversibilité des opérations qui ne sont pas autre chose qu’un ensemble de régulations compensatrices. Interviennent enfin les compensations dynamiques qui tendent à la restauration après des perturbations locales non destructives du tout comme tel. Elles permettent de concilier une grande régularité d’ensemble avec une grande variété de détails. Pour Piaget, ces compensations sont essentiellement constructives puisqu’elles ne consistent pas à revenir à l’équilibre initial mais à le majorer, d’où l’idée d’équilibration majorante inhérente aux abstractions réfléchissantes aussi bien qu’aux reconstructions convergentes dont témoigne la formation d’un nouveau génotype à partir d’accommodations in initialement phénotypiques. En somme, la dynamique globale en jeu dans les systèmes tant biologiques que cognitifs, correspond à la fonction d’organisation exercée par le tout sur les parties, les restructurations réversibles, au flux des transformations à l’intérieur du système et donc aux interactions entre parties différenciées, et les compensations dynamiques, au renouvellement du contenu de l’organisation et, partant, aux constructions nouvelles engendrées par les compensations.

©Marie-Françoise Legendre

Toute extrait de la présente présentation doit mentionner la source: Fondation Jean Piaget, Piaget et l'épistémologie par M.-F. Legendre
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Citations

Comportement
Nous entendons par comportement l’ensemble des actions que les organismes exercent sur le milieu extérieur pour en modifier des états ou pour changer leur propre situation par rapport à lui : par exemple, la recherche de nourriture, la construction d’un nid, l’utilisation d’un instrument, etc. C.M.E., p. 7.
En un mot, le comportement est constitué par les actions de caractère téléonomique visant à utiliser ou transformer le milieu ainsi qu’à conserver ou à augmenter les pouvoirs que les organismes exercent sur lui. C.M.E., p. 8.
Il se pourrait (…) que le rôle du comportement soit fondamental à titre de facteur nécessaire (..) de l’évolution (…) si l’on ne veut pas aboutir à rendre aléatoire l’intelligence elle-même et, avec elle, la science biologique, ni à confondre la sélection des accommodations en fonction de l’expérience ou du milieu avec la sélection dite seule «naturelle» se mesurant à la survie et au taux différentiel de multiplication. C.M.E., pp. 8-9.

Caractère inné du comportement
(…) le caractère inné du comportement en ses sources est une synthèse de préformations et de constructions : il est préformé en tant qu’expression de l’ «organisation» générale de tout être vivant, donc que manifestation particulière de la dynamique des «systèmes» avec ses trois caractères d’une invariance approximative du «tout», de son action coordinatrice exercée sur les parties et des compensations provoquées par les perturbations; mais il est constructif en tant que ne dépendant ni de programmes arrêtés dans les détails ni d’actions simplement exogènes du milieu, il consiste en activités exercées sur le milieu avec la liberté de manœuvre que supposent les réponses aux perturbations ou à la diversité des situations extérieures. C.M.E., pp. 91-92

Finalité des comportements
Nous dirons donc de tout comportement animal, comme de toutes les conduites observées chez l’enfant et l’homme en général, que chaque accommodation est toujours relative à un processus d’assimilation praxique ou cognitive, entendant par là une intégration à une structure de comportement antérieure (…). Cette intervention permanente de l’assimilation constitue un premier argument, mais à lui seul fondamental, en faveur de la nécessité de facteurs ou processus endogènes au sein de tous les comportements. (…) la première finalité ou direction [des] comportements est l’alimentation des schèmes d’assimilation, autrement dit l’exercice continu ou périodique des schèmes d’action déjà constitués et utilisant les éléments offerts par le milieu. C.M.E., p. 28.
(…) les frontières de l’assimilation praxique ne peuvent que s’élargir en passant des conduites par contact aux incitations à distance ou des effectuations aux anticipations et aux précautions. (…) tandis que l’assimilation physiologique procède par simples répétitions sans références aux phases antérieures, l’assimilation propre aux comportements engendre une mémoire qui multiplie les relations et contribue à son extension. (…) à comparer les mécanismes fonctionnels fondamentaux, communs à la physiologie et aux comportements, le contraste est systématique entre les tendances conservatrices l’emportant dans le premier de ces domaines et les facteurs d’expansion qui, au plan des comportements, conduisent l’assimilation et l’accommodation combinées à ce qui paraît constituer à tous les niveaux la double finalité des conduites : l’élargissement du milieu et l’accroissement des pouvoirs de l’être vivant. C.M.E., p. 172.

Caractère téléonomique du comportement
De manière générale tout comportement étant téléonomique en tant qu’action exercée sur le milieu extérieur, on ne saurait concilier cette finalité intervenant dès le départ avec une formation aléatoire (sauf à laisser une part du hasard mais au cours d’essais et tâtonnements globalement dirigés) et le fortuit est encore moins plausible en cas de compensation; par ailleurs la sélection «survie» (au sens total du taux différentiel de multiplication, etc.) ne suffit pas à rendre compte de «l’adéquation». C.M.E., p. 115.
(…) le comportement consiste en actions exercées sur un milieu qui sort des frontières du soma et implique de nouvelles finalités s’ajoutant à celles du programme biochimique de la morphogénèse. C.M.E., p. 126.

Adaptations propres aux comportements
(…) les adaptations qui caractérisent les divers comportements (…) comportent (…) un «savoir-faire» supposant une activité accommodatrice de l’organisme lui-même et non plus simplement le triage automatique exercé de l’extérieur selon qu’il favorise ou exclut la survie. (…) Il y a donc là une adaptation praxique et cognitive bien plus générale que l’adaptation-survie en ce qu’elle exige une structuration du milieu par l’organisme lui-même, en plus des effets d’acceptation ou de refus dus à la sélection. C.M.E., pp. 18-19.
(…) les transformations évolutives comportant une signification adaptative (ce qui n’est pas le cas de n’importe quelle mutation) sont toujours solidaires, chez l’animal, de nouveaux comportements. A.V.P.I., p. 103.

Variation adaptative
(…) plus la variation nouvelle doit être adéquate à telle ou telle particularité spécialisée du milieu, (…) et plus il faut trouver de liens entre les formations endogènes et les actions exogènes, (…). La raison en est qu’il existe une différence fondamentale entre le mécanisme héréditaire assurant la transmission d’une forme quelconque (morphogénèse) et celui qui transmet un comportement. C.M.E., p. 19.

Adaptation à un nouveau milieu
(…) une accommodation nouvelle et un comportement provoqué par un changement de milieu modifient naturellement à des degrés divers le milieu intérieur. (…) l’adaptation à un nouveau milieu extérieur peut engendrer, de pair avec de nouvelles conduites, des déséquilibres plus ou moins profonds altérant le milieu intérieur à des niveaux hiérarchiques plus élémentaires : c’est alors que les nouvelles mutations pouvant se produire (…) seront sélectionnées par le milieu interne, donc par une sorte d’endo-adaptation; et, comme ce milieu a été transformé en liaison avec la formation du phénotype, il n’est donc pas surprenant que les nouvelles mutations sélectionnées par ce milieu intérieur modifié «imitent» ce phénotype. (…) il y a donc remplacement et nullement fixation (…) dû à une reconstruction endogène sans aucune action directe des facteurs exogènes propres au milieu extérieur. C.M.E., pp. 42-43

Adaptation des comportements aux milieux
Quant à l’adaptation des comportements aux milieux particuliers auxquels ils correspondent, il faut (…) distinguer deux problèmes : celui de l’adaptation globale ou survie (entendant par là aussi bien la reproduction favorable de l’espèce ou de la population que la survie des individus) et celui de l’adaptation différenciée que nous nommerons «adéquation» et qui suppose une correspondance détaillée ou morphisme (…) entre certains organes ou mouvements de l’organisme et des caractères particuliers du milieu ou des objets sur lesquels porte l’action (…). C.M.E., p. 49.

Supériorité des comportements phénotypiques
Les trois grandes supériorités des comportements qui débutent de façon phénotypique et surtout épigénétique sont : (α) de rendre contemporaines et solidaires l’accommodation à ce nouveau milieu, «choisi» par l’organisme et la modification des conduites visant à assurer cette accommodation; (β) de conférer à cette adaptation une forme «d’adéquation» favorisant naturellement la survie, mais atteignant en plus une correspondance plus ou moins détaillée entre la nouvelle conduite et tel caractère spécifique du milieu, ce qui rend ainsi l’accommodation plus différenciée et efficace; (∂) d’établir une liaison directe entre le nouveau comportement et au moins un début de modification structurale, qui en ce cas reste naturellement lui aussi phénotypique, mais en réduisant au minimum la part du hasard. C.M.E., pp. 62-63

Genèse des comportements héréditaires
(…) l’interprétation que nous allons chercher à soutenir concernant la genèse des comportements héréditaires (…) comporte trois parties ou hypothèses complémentaires. La première consiste à admettre l’existence de comportements que nous appellerons «élémentaires» (…) d’un niveau susceptible d’être atteint par voie somatique, autrement dit, par des accommodats phénotypiques (…). (…) La seconde hypothèse sera que de tels comportements «élémentaires», lorsqu’ils se présentent sous une forme héréditaire, ont été constitués par phénocopie (…). La raison en est double. En premier lieu, tout comportement consistant en une action exercée sur le milieu, il faut choisir entre une source aléatoire ou des essais par contact avec les données extérieures, à un niveau initial déjà somatique. En second lieu, la sélection en jeu qui commande la réussite n’est pas affaire de simple survie mais d’ «adéquation», d’où le rôle primordial du milieu intérieur modifié par les accommodations phénotypiques (…). (…) La troisième hypothèse sera alors que les comportements spécifiques complexes (…) seront dus aux mécanismes combinatoires, compensateurs et constructifs que nous avons supposés exister en plus des anticipations et généralisations déjà à l’œuvre aux niveaux «élémentaires». C.M.E., pp. 122-123 .

Raisons de l’évolution
(…) les raisons de l’évolution sont à chercher à une autre échelle que les seuls mécanismes de la reproduction et (…) si l’organisme est une système «ouvert», le problème est à situer au plan des rapports entre cette ouverture relative et sa fermeture fonctionnelle sous forme de cycles, toutes deux aussi nécessaires l’une que l’autre à l’autoconservation du système, mais leurs interactions étant sujettes à variations évolutives sans cesse renouvelées du fait précisément qu’il y a ouvertures aussi bien que tendance à la fermeture. C.M.E., p. 170.

Rôle du comportement dans l’évolution
(…) la triple exigence qui caractérise la situation spéciale des comportements au sein des mécanismes évolutifs : c’est de comporter une adaptation intrinsèque aux trois points de vue de leur finalité, de leurs adéquations spécialisées et du rôle particulier des sélections exercées par le milieu interne comme médiation entre le milieu extérieur et l’orientation des variations nouvelles. C’est, semble-t-il, la réunion de ces trois caractères qui confère au comportement son pouvoir moteur dans l’évolution. C.M.E., pp. 179-180

Adaptations propres aux comportements
(…) le second aspect du caractère intrinsèque des adaptations du comportement : c’est de conduire à un savoir-faire isomorphe à un système cognitif. A cet égard ces adaptations sont bien distinctes des adaptations ou sélections retenant les plus «aptes» au seul sens de la survie :celles-ci portent sur les individus en tant que vigoureux et féconds, tandis que l’adaptation par adéquation sélectionne les essais ou actions comme tels en fonction de leur réussite, elle-même relative aux finalités poursuivies. C.M.E., p. 180.

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[…] la psychologie ne consiste pas à traduire le fonctionnement nerveux en termes de conscience ou de conduite, mais à analyser l’histoire de ces conduites, c’est-à-dire la manière dont une perception, par exemple, dépend des précédentes et conditionne les suivantes.